Article n°4: « Le Bong Sao, cet inconnu ».

Dans ce quatrième article, Sifu Marcus SCHÜSSLER nous aide à mieux comprendre un illustre inconnu pour tous les pratiquants de Wing Tsun: le Bong Sao

Jusqu’à présent, on a publié peu d’articles sur le Bong Sao dans le Wing Tsun. Les seules connaissances assez largement diffusées sont:

  • d’une part, qu’il signifie une déformation lorsque la force de l’attaque adverse sur la ligne centrale est trop grande pour appliquer le principe de céder en Wing Tsun.

  • et d’autre part, que la traduction littérale est “bras basculant”.

Mais qu’est-ce qu’est vraiment le Bong Sao? Ces informations simples suffisent-elles pour une compréhension approfondie?

Une explication logique par le système de la ou des lignes de combat centrales

Pour expliquer le Bong Sao, on peut s’appuyer encore une fois sur le concept de base du Wing Tsun: le système logique de la ou des lignes de combat centrales, abordé pour ainsi dire sur un plan architectural.

Pour les germanophones, des explications détaillées sont disponibles dans le livre: La logique de l’autodéfense en 120 minutes, théorie et pratique, tome I: La logique de l’art de l’auto-défense Wing Tsun.

Pour les lecteurs français, voici un bref résumé:

Supposez que vous touchiez votre front avec une planche tenue horizontalement et que vous décaliez en pensée verticalement la projection de la planche vers le bas. Vu d’en haut, cette surface forme la ligne de base de votre tête. La partie proéminente de votre tête, le nez, dépasse toujours à angle droit de la tête et la pointe du nez forme l’origine à partir de laquelle se dessine la ligne de combat centrale.

Wing Chun Wing Tsun Kung Fu Lyon

La deuxième ligne symétrique d’origine est la ligne médiane du corps, vue de devant.

Pour obtenir cette verticale médiane, supposez que vous teniez une barre verticale devant votre nez:

Wing Chun Wing Tsun Kung Fu Lyon ligne médianeToutefois, le prolongement de la ligne vers l’avant en partant du nez n’a pas de portée clairement définie.

Wing Chun Wing Tsun Kung Fu Lyon ligne centreDe façon analogue à l’homme de Vitruve, dessiné par Léonard de Vinci, l’angle droit entre les bras et le corps détermine la portée maximale du corps.

Wing Chun Wing Tsun Kung Fu LyonPour le réaliser, tendez les deux bras vers l’avant et pressez fortement les paumes des mains l’une contre l’autre. Vous obtenez ainsi un nouveau point d’extrémité à l’avant du corps dont la distance correspond à la longueur de vos bras. Dans le même temps, ce point d’extrémité décale la verticale médiane vers l’avant le long de la ligne du nez. L’extrémité de vos doigts définit donc le point de la ligne du nez. Votre ligne de combat centrale personnelle est ainsi fixée. et le point de départ s’est abaissé jusqu’au niveau de l’extrémité des doigts. La correspondance virtuelle entre le nez et l’extrémité des doigts est une aide supplémentaire.

Wing Chun Wing Tsun Kung Fu Lyon ligne brasAvec cette construction, pour laquelle vous n’avez pas besoin d’une autre personne, vous avez formé votre “ligne personnelle centrale de combat” liée à vos proportions corporelles personnelles. Chaque ligne personnelle centrale de combat est donc variable d’un individu à l’autre.

Postez-vous maintenant en face de votre partenaire. Déterminez également sa ligne personnelle centrale de combat. En plaçant les positions de bras obtenues l’une au-dessus de l’autre, les deux lignes de combat centrales personnelles se fondent pour donner la ligne de combat centrale commune.

Wing Chun Wing Tsun Kung Fu Lyon ligne communeDès lors, à tout moment et dans chaque situation, il vous faut maintenir le contrôle et la verticalité de votre ligne de combat centrale personnelle comme de la ligne de combat centrale commune. Si l’un des pratiquant ouvre la structure de ses bras, l’autre peut complètement contrôler son partenaire à l’aide de coups ciblés en avançant simplement de tout son corps. Vous êtes donc obligés de maintenir à tout prix cette ligne de combat fermée et de la mettre en mouvement de manière fermée.

Cette explication s’appuie sur une base logique et systématique. Toutes les techniques et toutes les actions en Wing Tsun doivent donc obéir à cette systématique. Si un seul élément s’écarte de ces paramêtres, il ne répond dès lors plus au systéme car cet écart exige de trouver une compensation externe. Or, comme la compensation externe ne se base pas sur le même fondement, elle ne peut pas non plus satisfaire à cette exigence et doit être remodelée pour intégrer le système.

Le Bong Sao doit satisfaire une base logique et systématique.

En pratique, la main doit toujours être sur/contre la ligne centrale, pour pouvoir la contrôler. Ce n’est que quand les mains sont sur la ligne de combat centrale qu’elles peuvent s’opposer au mouvement de l’adversaire et fournir au corps les informations qui lui indiquent s’il peut annihiler l’attaque en question ou si, par déformation, il doit lui céder tout en conservant le contrôle de la ligne de combat centrale. Ceci constitue une des tâches les plus importantes du Bong Sao et définit la ‘déformation maximale du bras’.

Comme la déformation maximale du bras a lieu sous des conditions dynamiques, le déroulement du mouvement et la position d’extrémité qui en résulte doivent être agencés de telle sorte que on puisse rester constamment en équilibre. Sinon, l’avantage tactique offert par la déformation est de nouveau perdu.

Un Bong Sao pour chacun: une nécessaire adaptation aux caractéristiques de chaque élève.

De nombreux pratiquants sont en désaccord fréquent quant à la position ou au mouvement correct sans s’accorder, ce faisant, sur des paramètres vraiment objectifs. Pour démontrer leur compétence, au lieu d’adapter systématiquement le Bong Sao aux caractéristiques corporelles de chaque élève, ils préfèrent se réclamer d’assertions de personnalités enseignantes décédées ou vivantes.

Du point de vue logique: si un professeur reconnu et émérite a déclaré que le Bong Sao devait être exécuté exactement de telle ou telle façon, alors cette définition est pertinente pour la seule personne à qui il a donné cette explication.

Mais pour un autre individu dont les paramètres corporels sont différents, il serait désastreux de réclamer une application inchangée du mouvement du Bong Sao. Par exemple un individu mesure 1m50 et démontre l’efficacité de son Bong Sao par une forme qui lui est adaptée. Une reprise identique appliquée à un individu d’1m80 n’est pas logique. Un maître digne de ce nom saura tailler le Bong Sao comme un costume sur mesures au corps de son élève, tout comme il saura réadapter ce Bong Sao sur mesure à tout autre élève, quelle que soit sa stature.

Dans les arts martiaux, on appelle cette application forcée d’une assertion à n’importe quelle personne la “tradition”. En cela, non seulement on compromet le succès de la fonctionnalité du mouvement mais on risque de nuire à sa santé. Concernant le Bong Sao, un phénomène de dysfonctionnement dans les épaules est ainsi très répandu. On ne s’extrait pas de cette “tradition” pour indiquer à l’élève les moyens et possibilités de d’atténuer ou d’éviter complètement ce malfonctionnement car cela ébranlerait la cohérence de l’image d’un “Bong Sao immuable”, commun à tous.

Le Bong Sao est un mouvement complexe. Il n’est pas par nature le résultat d’une quelconque évolution dans le subconscient humain, pas plus que ne l’est une stratégie corporelle se basant sur une ligne de combat centrale. Sinon, tout homme serait par nature un expert en matière d’art martial logique et disposerait dès sa naissance de toutes les aptitudes que des milliers d’individus sur cette terre s’efforcent de conquérir.

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